Saints Martyrs BORIS et GLEB

nommés Romain et David au Saint Baptême
 

06/08 - 24/07
 

Transfert des Reliques :
15/05 - 02/05


 
 
Saints Boris et Gleb étaient les deux fils cadets du Saint prince Vladimir, et ils s'étaient distingués depuis leur enfance par leur douceur et leur piété. Aussitôt après la mort de Saint Vladimir (15 juillet 1015), leur aîné, Sviatopolk, qui était depuis longtemps jaloux de la faveur de ses deux jeunes frères, décida de se débarrasser d'eux pour s'emparer de leur part d'héritage. 

C'est en revenant d'une expédition victorieuse contre la peuplade païenne des Petchenègues que le jeune Boris apprit la nouvelle de la mort de son père et, en approchant de Kiev, il priait le Seigneur d'accueillir Vladimir dans le choeur des justes et se consolait en pensant que Sviatopolk serait désormais pour lui comme un père. 
Averti par un espion que Boris ne nourrissait aucun mauvais sentiment envers lui et qu'il n'avait nullement l'intention de lui disputer la succession, Sviatopolk persista néanmoins dans son intention de le faire périr. Il choisit les plus cruels de ses serviteurs et les envoya à la rencontre de son frère, leur donnant l'ordre de le surprendre pendant son sommeil. Boris fut prévenu des intentions de son frère, mais il ne put y croire et poursuivit son chemin avec l'innocence d'une brebis. 

Deux jours plus tard, on lui confirma le dessein de son aîné et on l'informa que son jeune frère Gleb avait quitté Kiev en bateau pour le rejoindre. Boris s'exclama: « Béni soit Dieu! Je ne m'enfuirai pas d'ici ni ne m'opposerai à mon frère aîné. Que la volonté de Dieu soit faite! » Les boyards et les soldats qui s'étaient mis librement à son service lui proposèrent d'investir la cité et d'en chasser Sviatopolk; mais Boris refusa et décida au contraire d'envoyer une supplique à son frère, implorant sa clémence, et de congédier ses troupes. Peu après, il apprit que les serviteurs de son frère avaient été aperçus à quelques heures de cheval du camp, près de la rivière Alta. Saisi d'une crainte humaine, il se mit à prier: « Souverain, Seigneur Jésus-Christ, ne me laisse pas périr, mais étends Ton bras puissant sur moi, pécheur et misérable: délivre-moi de la fureur de ceux qui marchent contre moi; délivre-moi en cette heure, puisque Toi seul es le refuge des désespérés! » Resté seul avec son serviteur hongrois, Georges, pour attendre l'arrivée des meurtriers, il se retira dans sa tente et passa sa dernière nuit dans les larmes et la prière, et trouva un réconfort et un élan de courage en se rappelant le souvenir des Saints martyrs tués par leurs parents: Nicétas, Vinceslas, Barbara. À l'aube, il fit célébrer les matines par un Prêtre, et se tournant vers une icône du Christ, il lui adressa cette supplique: « Seigneur Jésus-Christ, Toi qui as daigné apparaître sur la terre sous forme humaine et qui t'es laissé volontairement clouer sur la Croix, Toi qui as accepté la passion à cause de nos péchés, donne-moi aussi d'accepter la mienne. Je la reçois non de mes ennemis, mais de mon frère: Seigneur, ne la lui impute pas comme péché. » Les envoyés de Sviatopolk arrivèrent alors sur place, mais n'osant interrompre l'Office, ils attendirent à l'extérieur de la tente qu'il fût terminé. L'Office achevé, Boris, après avoir embrassé ses-proches, s'étendit sur sa couche et attendit les meurtriers qui se précipitèrent dans la tente, tels des bêtes féroces. Son fidèle Georges essaya de s'interposer et de protéger son maître en le couvrant de son corps, mais il tomba sous les coups des meurtriers qui se ruèrent ensuite sur Boris. Le Saint supplia son frère de lui laisser encore quelques instants pour prier Dieu, puis s'offrant aux lances comme un agneau innocent, il dit en pleurant: « Approchez, frères, et terminez votre office, et que la paix soit avec mon frère et avec vous. » Les hommes lui plongèrent alors leurs lances dans le corps, puis, le croyant mort, ils entreprirent de massacrer sa suite. Mortellement blessé, Boris se traîna à grand peine à l'extérieur de la tente et pria: « Je Te rends grâces, Seigneur, mon Dieu, de m'avoir accordé, tout indigne que je sois, de communier à la Passion de Ton Fils. Jai été blessé par les serviteurs de mon père, pardonne-leur leurs péchés, accorde-moi le repos en compagnie des Saints. Car Tu es mon défenseur, Seigneur, et entre Tes mains je remets mon esprit. » Revenu sur ses pas, l'un des assassins acheva Boris. Son corps fut ensuite transporté dans l'église Saint-Basile à Vychégorod.

Dès qu'il eut appris la fuite de Gleb, Sviatopolk avait dépêché à sa poursuite des hommes sûrs, leur ordonnant de le mettre à mort. Voyant approcher ces embarcations, Gleb pria ses proches de ne pas résister et même de s'éloigner. Il pensait ainsi être capturé seul et conduit devant son frère qu'il espérait apitoyer, au risque de mourir seul à la place de tous. Mais, quand le danger devint imminent, le jeune prince prit peur et supplia le Seigneur de lui porter secours. Les envoyés de Sviatoplok arraisonnèrent l'embarcation de Gleb et, montant à bord, il ordonnèrent au cuisinier du prince, qui se tenait derrière lui, de l'égorger. Celui-ci saisit la tête de son maître qui se laissa faire, comme une brebis d'abattoir, et adressant une prière au Christ, il confessa que s'offrant au glaive de ses meurtriers, il participerait de cette manière à Sa Passion salutaire. Triomphant ainsi de la peur de la mort et de la souffrance par le souvenir du Christ, il s'offrit sans résistance à son assassin qui le frappa à la tête et lui trancha la gorge. Les meurtriers emportèrent alors son corps et le dissimulèrent sous un arbre, puis ils revinrent à Kiev pour rendre compte de leur mission à Sviatopolk. Ce dernier, surnommé le "maudit", fut bientôt déposé par une révolte populaire, et son frère Iaroslav le Sage s'empara du pouvoir.

Cinq ans après la passion des deux frères, des chasseurs découvrirent dans la forêt un cadavre intact, qui resplendissait comme l'éclair. On comprit qu'il s'agissait du corps de Saint Gleb, et le prince Iaroslav ayant été prévenu, il ordonna que le corps fût transporté à Vychégorod, afin d'y reposer à côté de celui de Saint Boris. Leur culte fut bientôt reconnu par l'Église, et leur tombe devint un lieu de pèlerinage, attirant des foules immenses de fidèles qui venaient y trouver la guérison et le réconfort dans leurs afflictions.

N.B. :  Premiers Saints canonisés de l'Église russe, ils sont aussi les premiers représentants des Strastoterptsi, c'est-à-dire les « Saints laïcs qui ont souffert la passion » sans résistance, catégorie de Saints particulière à l'hagiographie russe, comme le sont :  Sts Igor de Kiev, Michel, de Tver, André de Bogolioubov, le tsarevitch Dimitri, Gabriel de Bialystok.
 
 
 
 
 
 
 

Tranfert des Reliques : 

On savait que le prince assassiné Boris avait été enterré à Vyshgorod près de Kiev. Et peut après, on découvrit les reliques du noble prince Gleb à Smyadyno, pas loin de Smolensk, d'où elles furent emmenées en convoi sur le Dniepr jusqu'à Kiev. Le Métropolitain Jean 1 de Kiev (1008-1035) vint solennellement avec tout son clergé à la rencontre des reliques incorrompues des saints Porteurs de la Passion, et les plaça dans l'église de Saint-Basile le Grand à Vyshgorod, où les reliques du Martyr Boris se trouvaient déjà. Alors les reliques des saints frères Boris et Gleb furent levées de terre, et placées dans une chapelle spécialement construite. Le 24 juillet 102, le temple des cinq coupoles construit par Yaroslav le Sage fut consacré en l'honneur des saints martyrs.

Dans les années qui suivirent, l'église des Boris et Gleb de Vyshgorod contenant les Saints des Porteurs de la Passion devint le temple famillial de la famille des Yaroslav, leur sanctuaire d'amour fraternel et de service à la nation. Le symbole de leur unité devint la commémoration célébrée de la Translation des Reliques de Boris et Gleb, fêtée le 2 mai. L'historique de l'établissement de cette fête est lié aux évènements qui l'ont précédée dans l'histoire Russe. Le 2 may 1069, le Grand-Prince Izyaslav, ayant été chassé de sa principauté durant 7 mois jusqu'à ce jour (c'est à dire depuis septembre 1068) à cause d'un soulèvement des habitants de Kiev, revint à Kiev. Par gratitude envers l'aide de Dieu qui rétablit la paix dans le pays Russe, le prince construisit, à la place de l'église de 1026 abimée par le temps, une nouvelle église "au sommet de toutes". Participèrent à sa consécration, 2 métropolitains, Georges de Kiev et Néophyte de Chernigov, ensemble avec d'autres évêques, des higoumènes et le clergé local. La translation des reliques, à laquelle participèrent tous ceux des Yarslova (Izyaslav, Svyatoslav, Vsevolod), fut au 2 mai, et cette date fut confirmée comme célébration annuelle.

Svyatoslav Yaroslavich, prince à Kiev pendant les années 1073-1076, entrepris un effort pour transformer le temple de Boris et Gleb en une église de pierre, mais il ne put faire élever la maçonnerie des murs que jusque 8 cubes de haut. Ultérieurement, Vsevolod ( + 1093) acheva la construction de l'église, mais elle s'effondra une nuit. 

La vénération des Saints. Boris et Gleb s'est fortement développée pendant l'ère des petits-fils de Yaroslav, amenant souvent une compétition particulièrement  pieuse parmi eux. Le fils de Izyaslav, Svyatopolk ( + 1113), construisit des reliquaires d'argents pour les saints. En 1102 le fils de Vsevolod, Vladimir Monomakh ( + 1125), envoya des artisans professionnels de nuit et fit parachever en secret les reliquaires argents avec des feuilles d'or. Mais le fils de Svyatoslav, Oleg ( + 1115), les surpassa. Il fut appelé "Gorislavich", et mentionné dans "le Récitde la Campagne d'Igor". Il "projeta de relever l'église de pierre effondrée et, ayant amené des constructeurs, il donna abondament tout qui était nécessaire". L'église fut prête en 1111. L'ayant parée, Oleg "fit pression ardemment sur Svyatopolk, pour qu'il y fasse transférer les reliques des Saints". Svyatopolk ne le voulait pas, "n'ayant pas construit cette église". 

La mort de Svyatopolk Izyaslavich ( + 1113) amena à Kiev une nouvelle insurrection, pendant laquelle Vladimir Monomakh fut presque tué, lui qui était devenu le grand prince de cette ville. Ayant décidé de cultiver l'amitié avec les Svyatoslavichi par une translation solennelle des Saints dans l'église d'Oleg, il le fit connaître à Oleg et David ( + 1123). "Vladimir, ayant rassemblé ses fils, et David et Oleg avec leurs fils, tous arrivèrent à Vyshgorod. Et tous les hiérarques, higoumènes, moines et prêtres vinrent, remplissant toute la ville et le long des murs il n'y avait pas d'espace libre pour la communauté". Au matin du 2 mai 1115, Dimanche des Femmes Myrhophores, ils commenèrent à chanter Matines aux deux églises, ancienne et nouvelle, et la translation des Saints commença. Et pendant ce temps se réalisa une division particulière : "et ils convoièrent d'abord Boris, et vint avec lui le métropolite Vladimir et le clergé". Après lui sur les autres véhicules vint saint Gleb : "avec lui vint David avec les évêques et le clergé". (Oleg attendant dans l'église). 

Cette séparation fut enterrinée par les générations futures. Saint Boris sera particulièrement considéré comme le protecteur céleste  des Monomashichi; saint Gleb,  particulièrement des Ol'govichi et Davidovichi. Cela ira si loin que dans son testament, Vladimir Monomakh ne mentionnera que Boris, sans parler de Gleb, et la lignée des Ol'govichi l'inverse, ne mentionnant que pas le nom de Boris.

En général, les noms de Boris et Gleb, et aussi Roman et David, furent estimés par nombres de générations de princes Russes. Les frères d'Oleg Gorislavich portèrent les noms de Roman (+ 1079), Gleb (+ 1078), David (+ 1123), et un de ses fils s'appelait Gleb (+ 1138). Les fils de Monomakh seront Roman et Gleb; ceux de Yuri Dolgoruky, Boris et Gleb; ceux de saint Rostislav de Smolensk, Boris et Gleb; et de saint André Boboliubsky, saint Gleb (+ 1174); et du Grand Nid [??] Vsevolod, Boris et Gleb. Parmi les fils de Vseslav de Polotsk (+ 1101) on trouve une série de fils "Boris-Gleb" : Roman, Gleb, David, Boris.

Les sanctuaires de Vyshgorod n'étaient pas le seul centre de vénération liturgique des saints Porteurs de la Passion Boris et Gleb. Cette vénération se répandit à travers toute la Russie. Tout d'abord, il y aura ces nombreux églises et monastères reliés d'une raison locale particulière aux martyrs des saints et à leur aide miraculeuse aux gens; le temple de Boris et Gleb à Dorogozhich sur la route de Vyshgorod, où selon la tradition, saint Boris rendit l'esprit; le monastère des Boris et Gleb à Tmo près de Tver où le cheval blessé de Gleb s'arrêta; un monstère du même nom à Smyadyno, à l'endroit du lieu de l'assassinat de Gleb; et sur la Tvertsa près de Torzhok (fondée en 1030), où on conservait le chef de saint Geroge le Hongrois [un serviteur apprécié de saint Boris fut décapité pour avoir volé de son cou le médaillon en or que saint Boris lui avait donné.] L'église des Boris et Gleb fut élevée à Al'ta en la mémoire de la victoire de Yaroslav le Sage sur Svyatopolk le Maudit le 24 juillet 1019; et à Gzena près de Novgorod à l'endroit de la victoire de Gleb Svyatoslavich contre un sorcier.

Les Ol'govichi et Monomashichi rivalisèrent l'un avec l'autre dans la construction d'église à grandes coupoles en l'honneur des saints martyrs. Oleg lui-même, en plus de l'église de Vyshgorod, érigea en 1115 la cathédrale des Boris et Gleb dans le Vieux Ryazan (raison pour laquelle le diocèse s'appelera Borisoglebsk par la suite). Et son frère David construisit de la même manière à Chernigov (en 1120). En 1132 Yuri Dolgoruky construisit une église de Boris et Gleb à Kideksh sur la rivière Nerla, "où avait été le campement de Saint Boris". En 1145 saint Rostislav de Smolensk  bâtit  "une église de pierre à Smyadyno", Smolensk. L'année suivante la première églose (en bois) dédiée aux Boris et Gleb fut érigée dans Novgorod. Dans 1167 une fondation de pierre remplaça celle bois, et elle fut achevée et consacrée en 1173. La chronique de Novgorod mentionne Sotko Sytinich comme le constructeur de l'église, le Sadko légendaire. 

Les Saints Porteurs de la Passion Boris et Gleb furent les premiers saints Russes canonisés par les Eglises Russe et Byzantine. Leur office fut rédigé peu après leur mort, et son rédacteur fut saint Jean 1, métropolite de Kiev (1008-1035), que les Menées du XIIe siècle commémorent. Le nombre incalculable de "vies", les comptes-rendus sur les reliques, les miracles et eulogies dans les manuscrits et livres imprimés des XIIe-XIVe siècle permettent de rendre témoignage de la vénération particulière dont bénéficient les saints Martyrs Boris et Gleb en Rus'.